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Indications et contre-indications

Indications générales

En cardiologie, les indications à l’ETO sont les situations dans lesquelles la voie transthoracique s’avère insuffisante. C’est le cas pour les structures postérieures (appendice auriculaire gauche, veines pulmonaires, septum interauriculaire, aorte thoracique), pour la valve mitrale, pour les prothèses valvulaires, pour les lésions fines (endocardite, athérome aortique, dissection) et pour la recherche de cause d’embolie artérielle. En périopératoire, on a classé les indications à l’ETO en trois catégories en fonction de leur portée diagnostique et thérapeutique [3,14,15,17].
 
  • Catégorie I: conditions dans lesquelles l’ETO est d’un impact évident et permet des décisions thérapeutiques majeures et immédiates, basées sur des informations impossibles à obtenir d’une autre manière. C'est le cas de toute la chirurgie cardiaque à cœur ouvert, y compris de la chirurgie de l'aorte thoracique, et des instabilités hémodynamiques réfractaires inexpliquées.
  • Catégorie II: conditions dans lesquelles l’apport de l’ETO n’est pas indispensable à la thérapeutique mais améliore et accélère la prise en charge des problèmes peropératoires, comme les simples pontages aorto-coronariens.
  • Catégorie III: catégorie dans lesquelles on ne peut pas prouver que l’ETO soit utile à l’amélioration clinique, même si elle permet une meilleure compréhension des processus physiologiques.
Les indications reconnues de catégorie I en peropératoire sont les suivantes [3,5,7,8].
 
  • Evaluation des modifications hémodynamiques aiguës et sévères dans lesquelles la fonction ventriculaire est incertaine;
  • Evaluation de la fonction bi-ventriculaire et de l’hypovolémie;
  • Plasties et reconstructions chirurgicales valvulaires, obstruction dynamique de la chambre de chasse, dissection aortique avec lésion potentielle de la valve aortique;
  • Evaluation de la chirurgie valvulaire complexe impliquant plastie, homogreffe et/ou réimplantation coronaire;
  • Chirurgie de la plupart des malformations congénitales;
  • Chirurgie valvulaire pour endocardite;
  • Chirurgie minimalement invasive ou percutanée (TAVI, MitraClip, HeartPort), canulations particulières;
  • Mise en place d'assistance ventriculaire;
  • Evaluation de la tamponnade et du drainage chirurgical;
  • Traumatisme thoracique avec instabilité hémodynamique.
Les indications placées en catégorie II sont :
 
  • Chirurgie valvulaire simple, évaluation de l’athéromatose aortique;
  • Chirurgie de l’ischémie myocardique, évaluation de la cinétique segmentaire après revascularisation, cure d’anévrysme ventriculaire ou de CIV ischémique;
  • Résection de masse intracardiaque, embolectomie;
  • Chirurgie de cardiopathies congénitales simples.
Les habitudes et les compétences locales modifient ces indications, qui ne représentent que l'avis d'experts. D’autre part, l’ETO est un instrument exceptionnel pour l’enseignement clinique de l’hémodynamique, ce qui élargit considérablement ses indications. Dans une mise à jour [15], l’American Society of Anesthesiologists et la Society of Cardiovascular Anesthesiologists recommandent l’utilisation de l’ETO pour toute la chirurgie du coeur et de l’aortique thoracique dans un triple but:
 
  • Confirmer et préciser le diagnostic préopératoire;
  • Détecter de nouvelles pathologies qui modifient la stratégie opératoire et anesthésique;
  • Evaluer le résultat de la correction chirurgicale.
Même pendant la CEC, l'ETO a un rôle important à jouer [9].
 
  • Recherche des anomalies qui peuvent modifier la conduite de la CEC: insuffisance aortique (cardioplégie), athéromatose aortique ascendante (canulation artérielle), valve d'Eustache ou réseau ce Chiari (canulation veineuse), FOP (cardiotomie, assistance ventriculaire), sinus coronaire élargi (veine cave supérieure gauche).
  • Placement des canules: canule veineuse introduite depuis la périphérie, canule artérielle périphérique (guide dans l'aorte ascendante), cardioplégie rétrograde dans le sinus coronaire, drainage du VG ou de l'OG, contrepulsion intra-aortique.
  • Pendant la CEC: décompression adéquate du VG, diagnostic différentiel de l'hypotension (dissection).
  • A la mise en charge: débullage, remplissage des cavités, fonction ventriculaire, fonction valvulaire, examen du résultat de l'opération, recherche de dissection, de tamponnade et d'épanchement pleural.
En chirurgie non-cardiaque, l’indication retenue est la potentialité ou l’installation d’une instabilité hémodynamique peropératoire sévère compromettant les fonctions cardiaque, pulmonaire et/ou neurologique [15]. La même indication fonctionnelle s’applique à la chirurgie cardiaque.

Complications et contre-indications

La mortalité et la morbidité liées à l'ETO sont très basses. La morbidité est de 0.2 à 0.7% [10,11,12]. Les complications les plus fréquentes sont [10,12] :
 
  • Odynophagie                          0.1%
  • Lésion dentaire                       0.03%
  • Extubation accidentelle           0.03%
  • Hémorragie digestive              0.03%
  • Perforation oesophagienne     0.01 à 0.09%
La mortalité oscille entre 0% (sur 7'200 et 12’986 examens) et 0.02% (sur 10'418 examens) [2,10,12]. Dans les deux tiers des cas, les lacérations de l'œsophage ne sont symptomatiques qu'après 24 heures, sous forme de douleur cervico-thoracique, de fièvre et d'emphysème sous-cutané [6]; leur incidence est basse (< 0.1%), mais leur mortalité voisine 20% [12]. Même si le taux de lésions oeso-gastriques nécessitant un traitement spécifique s’élève jusqu’à 1.2% dans certaines séries [11], le rapport risque/bénéfice reste excellent. Un certain nombre de situations est associé à une élévation du risque par rapport à la moyenne [1].
 
  • Examen ETO réalisé en urgence au déchoquage;
  • Polytraumatisé avec lésions potentielles de la colonne vertébrale;
  • Examen chez un malade instable aux soins intensifs;
  • ETO pédiatrique;
  • Obésité pathologique;
  • Dilatation de l'OG.
Manoeuvre peu invasive, l’ETO a peu de contre-indications absolues ; celles-ci sont essentiellement liées aux pathologies digestives hautes ou cervicales [1,8,15].
 
  • Sténose, diverticule ou tumeur de l’oesophage, achalasie, sclérodermie;
  • Chirurgie oeso-gastrique récente;
  • Perforation gastrique ou oesophagienne;
  • Hématémèse massive;
  • Fracture instable prouvée de la colonne cervicale;
  • Lésion ORL grave.
Il existe un certain nombre de situations qui représentent des contre-indications relatives.
 
  • Status après radiothérapie thoracique;
  • Arthrose cervicale sévère, suspicion de fracture de la colonne cervicale;
  • Varices oesophagiennes, hernie hiatale, oesophagite, maladie ulcéreuse;
  • Anamnèse d’hématémèse, coagulopathie;
  • Enfants de poids inférieur à 4 kg.
Il arrive que l’on doive utiliser une sonde pédiatrique lorsque la dimension des sondes normales est excessive pour l’anatomie du patient ou lorsque des ostéophytes ou des becs-de-perroquet arthrosiques du rachis cervical bloquent l'avancement d'une sonde adulte par protrusion contre l'œsophage [4]. De toute manière, la plus grande prudence est de mise: il est impératif de ne jamais forcer le passage et de savoir renoncer lorsque la situation est trop inquiétante. Chez les enfants, on peut utiliser une sonde adulte au-delà d’un poids de 20 kg.

Cependant, la contre-indication la plus importante tient au manque de formation. Comme l’obtention d’images de bonne qualité est aisée par voie transoesophagienne, cette facilité apparente fait oublier la double nécessité de solides connaissances en échocardiographie et de rigueur dans l’analyse des données. Un examen mal interprété handicape plus gravement les résultats cliniques que l'absence d'examen [13]. La deuxième remarque tient à la disponibilité de l'anesthésiste qui doit simultanément observer l'échocardiographie et conduire l'anesthésie du patient. Mener ces deux activités de front avec efficacité relève de la gageure, et la qualité du travail s'en ressent immédiatement. L'attention nécessaire à suivre l'imagerie des ultrasons détourne l'anesthésiste de la prise en charge du malade [16], parce que l'ETO n’est pas conçu comme un monitorage peropératoire automatique mais comme un système diagnostique. Il est donc capital que deux cliniciens se partagent la tâche en salle d'opération; cela est d'autant plus vrai que le malade est dans un état critique, car c'est dans ce cas que l'ETO est le plus mis à contribution.
 
 
Indications et contre-indications de l'ETO
L'ETO fait maintenant partie des règles de l'art en matière d'anesthésie pour la chirurgie cardiaque. Elle sert à préciser le diagnostic préopératoire, à détecter de nouvelles pathologies modifiant la stratégie chirurgicale ou anesthésique, et à évaluer le résultat de la correction chirurgicale. Son impact est plus ou moins important selon les circonstances et les opérations. Lorsqu'il est majeur (plasties valvulaires, obstruction dynamique, dissection aortique, assistance ventriculaire, maformations congénitales, choc cardiogène), l'ETO est indispensable.

Le taux global de complications est < 1%. Les complications sont par ordre décroissant de fréquence:
    - Déséquilibre hémodynamique momentané
    - Odynophagie
    - Hémorragie digestive haute
    - Lacération oesophagienne

Contre-indications à l'ETO:
    - Sténose, diverticule ou tumeur de l’œsophage
    - Chirurgie oeso-gastrique récente
    - Perforation gastrique ou oesophagienne
    - Hématémèse massive
    - Fracture instable prouvée de la colonne cervicale

Contre-indications relatives méritant une évaluation du rapport risque/bénéfice:
    - Status après radiothérapie thoracique
    - Arthrose cervicale sévère
    - Varices oesophagiennes ou hernie hiatale
    - Anamnèse d’hématémèse


© CHASSOT PG, BETTEX D. Mars 2011, Avril 2019; dernière mise à jour, Mars 2020


Références
 
  1. BAR-YOSEF S, SCHROEDER R, MARK JB. The nuts and bolts of a perioperative TEE service. In: MATHEW JP, SWAMINATHAN M, AYOUB CM. Clinical manual and review of transesophageal echocardiography, 2nd edition. New York: McGraw-Hill 2010,540-57
  2. CHASSOT PG. Statistiques ETO 1991-2008, CHUV 2008
  3. CHEITLIN MD, ARMSTRONG WF, AURIGEMMA GP, et al. ACC/AHA/ASE 2003 Guidelines update for the clinical application of echocardiography: Summary article. Circulation 2003; 108:1146-62
  4. ELSAYED H, SHACKCLOTH M. Should cervical and thoracic osteophytes be a contraindication for transesophageal echocardiography in cardiac surgery? J Cardiothorac Vasc Anesth 2013; 27:319-20
  5. FLASCHKAMPF FA, DECODT P, FRASER AG, et al. Subgroup on transesophageal echocardiography and valvular heart disease: working group on echocardiography of the European Society of Cardiology. Guidelines from the working group. Recommendations for performing transesophageal echocardiography. Eur J Echocardiogr 2001; 2:8-21
  6. FLASCHKAMPF FA, BADANO L, DANIEL WG, et al. Recommendations for transoesophageal echocardiography: update 2010. Eur J Echocardiogr 2010; 11:557-76
  7. FLASCHKAMPF FA, WOUTERS PF, EDVARDSEN T, et al. Recommendations for transoesophageal echocardiography: EACVI update 2014. Eur Heart J Cardiovasc Imaging 2014; 15:353-65
  8. HAHN RT, ABRAHAM T, ADAMS MS, et al. Guidelines for performing a comprehensive transesophageal echocardiography examination: Recommendations from the American Society of Echocardiography and the Society of Cardiovascular Anesthesiologists. J Am Soc Echocardiogr 2013; 26:921-64
  9. HESSEL EA. What's new in cardiopulmonary bypass. J Cardiothorac Vasc Anesth 2019; 33: 2296-326
  10. KALLMEYER IJ, COLLARD CD, FOX JA, BODY SC, SHERNAN SK. The safety of intraoperative transesophageal echocardiography: A case series of 7200 cardiac surgical patients. Anesth Analg 2001; 92: 1126-30
  11. LENNON MJ, GIBBS NM, WEIGHTMAN WM, et al. Transesophageal echocardiography – Related gastrointestinal complications in cardiac surgical patients. J Cardiothorac Vasc Anesth 2005; 19:141-5
  12. PIERCY M, McNICOL L, DINH DT, et al. Major complications related to the use of transesophageal echocardiography in cardiac surgery. J Cardiothorac Vasc Anesth 2009; 23:62-5
  13. STEVENSON JG. Adherence to physician training guidelines for pediatric transesophageal echocardiography affects the outcome of patients undergoing repair of congenital cardiac defects. J Am Soc Echocardiogr 1999; 12:165-72
  14. THYS DM, ABEL M, BULLEN BA, et al. Practice guidelines for perioperative transesophageal echocardiohraphy. A report of ASA/SCA Task Force on transesophageal echocardiography. Anesthesiology  1996; 84:986-1006
  15. THYS DM, ABEL MD, BROOKER RF, et al Practice guidelines for perioperative transesophageal echocardiography. An updated report by the ASA and SCA Task Force on transesophageal echocardiography. Anesthesiology 2010; 112:1084-96
  16. WEINGER MB, HERNDON OW, GABA DM. The effect of electronic record keeping and transesophageal echocardiography on tasks distribution, workload, and vigilance during cardiac anesthesia. Anesthesiology 1997 87:144-155
  17. WOUTERS PF, GUARRACINO F, SEEBERGER M. Perioperative echocardiography. In: LANCELOTTI P, ZAMORANO JL, HABIB G, BADANO L. The EACVI Textbook of echocardiography. Oxford: Oxford University Press, 2017, 575-93

 
25. Echocardiographie transoesophagienne 1ère partie